Les années douces

51GXC5F6BFL__Voilà longtemps que j’avais envie de lire Hiromi Kawakami, et je suis contente que le challenge Ecrivains japonais d’Adalana m’ait donné l’occasion de le faire. Ne sachant pas par lequel commencer, j’ai pris Les années douces un peu au hasard, parce que le titre et l’image de couverture me plaisaient.

La narratrice, Tsukiko, est une femme célibataire qui approche de la quarantaine. Un soir, dans un troquet où elle a ses habitudes, elle est interpellée par un homme dont le visage lui rappelle vaguement quelques choses. Rassemblant ses souvenirs, elle comprend peu à peu qu’il était son professeur de japonais de l’époque au lycée. La conversation se noue entre eux et leurs goûts culinaires communs les rapproche.Tous deux prennent ainsi peu à peu l’habitude de se retrouver, de façon fortuite, dans ce bistrot pour boire et discuter.

C’est une histoire très simple et banale, si ce n’est que cette relation qui se noue peu à peu lie une femme et un vieil homme qui a le double de son âge. Le temps s’écoule au rythme des petits événements qui marquent la succession des saisons : cueillette des champignons, nouvel an, floraison des cerisiers… La narration est elle aussi simple et banale, tant dans le vocabulaire choisi que dans la construction des phrases, presque orale à certains endroits, ce qui m’a fait deux ou trois fois grincer des dents. Le rythme est lent et il ne se passe rien de fracassant.

Pourtant, c’est un livre que j’aurais envie de qualifier de confortable. Il est tout en douceur et en délicatesse, et je me suis sentie bien dans son ambiance. Il y a eu des moments où j’étais pressée de lire la suite mais, le plus souvent, j’ai eu envie de le lire à un rythme tranquille (si tant est que j’en sois capable) afin de le savourer à loisir. J’aurais eu plaisir, si le roman avait été plus épais, à y rester plus longtemps.

Je savais depuis longtemps qu’il existait un manga en deux tomes de Taniguchi du même nom. Mais il ne m’était pas venu à l’idée de faire un lien entre les deux jusqu’à ce que je lise le billet de Jérôme, que je remercie, du coup. J’ai eu beau me dire que j’allais forcément être déçue par le manga si j’enchaînais les deux versions, je n’ai pas pu m’empêcher de me précipiter sur celui-ci lors de mon premier passage en librairie. Et, au final, je ne le regrette pas du tout.

41E+WMqG0nL__Le manga est une adaptation du roman qu’il suit fidèlement, jusque dans le découpage des chapitres. Lire les deux peut donc sembler redondant. A choisir, il me semble qu’il vaut mieux commencer par le manga, puis lire le roman, le premier étant – fatalement – un résumé du second.

Pour autant, contre toute attente, j’ai beaucoup apprécié de lire le manga juste après le roman, car celui-ci en est une adaptation fidèle et m’a permis de rester dans cette atmosphère du roman qui m’avait séduite. J’ai beaucoup aimé la façon dont Taniguchi a dessiné les deux héros. Tsukiko est une femme ordinaire, pas particulièrement jolie, mais que j’ai trouvée très belle dans certaines cases. Le professeur semble beaucoup moins vieux que les 70 ans que le roman lui attribue. Je le vois plus proche de la cinquantaine dans le manga. Psychologiquement pour moi ça passe mieux.41PV7OET6AL__

De façon générale, j’y ai retrouvé la lenteur, le goût des petits plaisirs de la vie et les mets appétissants que j’avais découverts dans Le gourmet solitaire. Et je suis admirative devant la précision du trait de Taniguchi. C’est un manga qui doit se déguster lentement… ce que je suis incapable de faire, et ça m’énerve beaucoup.

Le manga se termine sur un échange entre Jirô Taniguchi et Hiromi Kawakami qui est très intéressant, et deux chapitres bonus dans lesquels Tsukiko raconte un souvenir d’enfance. Ces deux chapitres sont tirés d’un roman intitulé Parade dont j’enrage de ne pas trouver de traduction française. Ce qui est certain, c’est que je n’en ai pas fini avec ces deux auteurs.

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15 commentaires pour Les années douces

  1. Mina dit :

    J’avais aussi repéré ce titre-ci quand j’avais fait des recherches pour le challenge d’Adalana, pour les mêmes raisons que toi : malgré les grincements de dents, tu m’as donné envie de me plonger un jour dans cette ambiance confortable.

    • Marie dit :

      Les grincements de dents furent très ponctuels et le style assez oral colle bien à la simplicité de l’histoire. Ca a été une très belle découverte pour moi. Si j’ai pu te donner envie, n’hésite pas!

  2. Adalana dit :

    J’ai envie de lire le roman et le manga !
    Merci pour ta participation encore une fois ! :)

  3. Ping : Challenge Écrivains japonais : Récap’ de novembre | Adalana's Imaginary World

  4. jerome dit :

    Il me reste à lire le roman maintenant. C’est aussi mon Taniguchi préféré avec Le gourmet solitaire. Et j’ai trouvé l’interview croisée romancier/dessinateur à la fin du manga très intéressante, très éclairante par rapport à l’oeuvre de Kawakami et à la façon dont Taniguchi l’a appréhendée.

    • Marie dit :

      Tu peux peut-être laisser passer un peu de temps puisque tu viens de lire le manga. Mais il y a, forcément, plus de choses dans le roman que dans le manga. Tu ne devrais pas t’ennuyer.
      On dirait que j’ai bien choisi pôur débuter avec Taniguchi. J’ai encore Quartier lointain en stock. Ensuite on verra.

  5. J’ai d’abord lu le 1er tome du Manga puis avec le Club des Lectrices nous avons lu le roman que j’ai préféré, j’ai aimé ce couple improbable et la douceur dont tu parles dans ton billet.

  6. Mo' dit :

    Dans ce cas, je vais certainement me prendre par la main pour lire enfin cette série de Taniguchi. J’en profite également pour noter les références du roman. La manière dont tu en parles me plait beaucoup

    • Marie dit :

      Puisque Jérôme dit que c’est un de ses Taniguchi préférés… :-) Mais il est peut-être mieux de lire le roman ou le manga plutôt que les deux d’un coup comme je l’ai fait. Même si c’était bien.

  7. Marilyne dit :

    Une lecture douillette, c’est exactement ça. J’en garde un joli souvenir, c’est pour cela que je n’ai toujours pas tenté le manga, je crains la déception, comme toi, mais finalement…

    • Marie dit :

      Je pense que tu peux risquer, du fait de la fidélité du manga au roman. a défaut que tes représentations mentales collent avec les dessins de Taniguchi, tu devrais au moins retrouver la même atmosphère douillette.

  8. Alison Mossharty dit :

    J’aime beaucoup Taniguchi, il me tarde de lire ce manga mais je voulais lire le roman avant (faire comme toi quoi ^^) y’a plus qu’a maintenant, en tout cas ta chronique est très intéressante à lire surtout avec la comparaison manga/roman !

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